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Des interrogations planent sur le cessez-le-feu Israël-Iran annoncé par Trump
information fournie par Reuters 24/06/2025 à 19:17

par Matt Spetalnick, Jeff Mason et Steve Holland

Quand Donald Trump a envoyé le week-end dernier des bombardiers pour frapper les installations nucléaires de l'Iran, le président américain a misé sur le fait qu'il pourrait aider Israël, allié de Washington, à paralyser le programme nucléaire de Téhéran tout en préservant sa promesse de longue date de ne pas entraîner les Etats-Unis dans des guerres prolongées.

A peine quarante-huit heures plus tard, le chef de la Maison blanche a déclaré de manière inattendue qu'Israël et l'Iran avaient accepté un cessez-le-feu, une annonce laissant à penser que les bombardements américains ont contraint le régime de Téhéran à reprendre les négociations avec Washington.

Mais d'importantes interrogations demeurent, notamment - et pas des moindres - la question de savoir si une trêve peut effectivement perdurer entre Israël et l'Iran, ennemis régionaux de longue date dont la guerre "de l'ombre" s'est transformée en guerre ouverte près de deux semaines plus tôt, avec des frappes mutuelles qui ont exacerbé les craintes d'un embrasement.

Ces doutes sur un cessez-le-feu ont été mis en exergue dès mardi, Donald Trump accusant les deux camps d'avoir enfreint la trêve quelques heures seulement après son entrée en vigueur supposée.

Demeurent également des questions sur les contours de l'accord de cessez-le-feu "complet et total" proclamé lundi, via son réseau social Truth, par le président américain.

Quelles conditions Israël et l'Iran ont-ils accepté ? Washington va-t-il rependre les négociations sur le programme nucléaire iranien, qui étaient dans l'impasse ? Que va-t-il advenir du stock d'uranium enrichi dont Téhéran disposerait toujours, selon de nombreux experts, en dépit des bombardements israéliens et américains ?

"ÉCHAPPATOIRE"

"Les Israéliens ont accompli une grande partie de leurs objectifs (...) et l'Iran cherchait une échappatoire", a déclaré Jonathan Panikoff, ancien responsable de haut rang des services du renseignement américain pour le Proche-Orient.

Washington "espère que c'est le début de la fin", a-t-il ajouté. "Le défi est de savoir s'il y a une stratégie pour ce qui va suivre".

Illustrant la complexité de la question, il a fallu attendre plusieurs heures pour qu'Israël et l'Iran admettent avoir accepté le cessez-le-feu que Donald Trump s'était vanté d'avoir négocié, alimentant l'espoir d'une issue au conflit de 12 jours, quand bien même aucun détail n'a alors été donné sur les termes acceptés par les deux camps.

Après qu'Israël et l'Iran se sont mutuellement reprochés d'avoir lancé mardi de nouvelles attaques, Donald Trump a effectué une réprimande rare à l'encontre du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, le président américain déclarant à des journalistes devoir "parvenir à calmer Israël".

En dépit des doutes sur le cessez-le-feu, les trumpistes ont immédiatement vanté ce qu'ils ont présenté comme une réussite historique découlant de l'approche de "paix via la force" prônée par l'administration américaine en matière de politique étrangère.

Donald Trump s'est rangé derrière l'analyse d'Israël selon laquelle l'Iran était proche de se doter d'une arme nucléaire, que Téhéran nie de longue date vouloir acquérir. Des agences du renseignement américain ont déclaré plus tôt cette année que l'Iran ne développait pas d'arme atomique et, selon une source ayant eu accès à des rapports des renseignements la semaine dernière, cette analyse n'a pas changé.

RÉPONSE CALIBRÉE

Quelques heures avant que Donald Trump annonce un accord de cessez-le-feu, l'Iran a lancé des missiles contre une base militaire américaine au Qatar, sans faire de victimes, une attaque présentée comme une réponse aux puissants bombardements américains contre des sites nucléaires iraniens au cours du week-end.

Selon des sources au fait de la question, l'administration Trump, qui a dit avoir été notifiée au préalable de l'attaque, a été calibrée par Téhéran de manière à éviter une escalade supplémentaire avec Washington.

Un haut représentant de la Maison blanche a déclaré lundi soir qu'Israël avait accepté de respecter un cessez-le-feu à condition que l'Iran ne lance pas de nouvelles attaques. Donald Trump a appelé les deux camps à avancer vers la paix et à participer à des discussions.

Le président américain s'est entretenu directement avec Benjamin Netanyahu à propos du cessez-le-feu, a dit ce représentant, tandis que le vice-président J.D. Vance, le secrétaire d'Etat, Marco Rubio, et l'émissaire spécial Steve Witkoff ont pris part à des échanges directs et indirects avec l'Iran. Le Qatar a également servi d'intermédiaire avec Téhéran.

L'Iran a été disposé à conclure un cessez-le-feu car il se trouvait dans une situation nettement "affaiblie", selon le représentant de la présidence américaine, après plusieurs jours de bombardements israéliens dans la capitale iranienne et à travers le pays, avec également les assassinats de scientifiques iraniens de premier plan et de commandants sécuritaires.

Si Washington a répété avoir eu pour unique objectif de détruire le programme nucléaire iranien et non pas d'ouvrir un conflit élargi, Donald Trump a évoqué ces derniers jours l'hypothèse d'un "changement de régime" à Téhéran, ennemi des Etats-Unis depuis la Révolution islamique iranienne de 1979.

D'après certains analystes, en cherchant à mettre fin aux hostilités, le président américain a montré qu'il était disposé à protéger la survie du régime iranien.

PARI SANS PRÉCÉDENT

Trois représentants israéliens ont signalé lundi qu'Israël entendait boucler sous peu sa campagne militaire contre l'Iran et qu'il l'avait fait savoir à l'administration américaine, tout en notant que cela dépendait grandement de Téhéran.

"Maintenant que Trump a décrété la 'paix mondiale', il va être compliqué pour Netanyahu de le contredire publiquement", a déclaré Laura Blumenfeld, experte du Proche-Orient à l'école Johns Hopkins pour les Etudes internationales avancées, basée à Washington.

En ordonnant de bombarder les sites nucléaires iraniens, Donald Trump a pris une décision à la fois sans précédent et contraire à sa promesse de longue date de ne pas impliquer militairement les Etats-Unis dans des guerres majeures à l'étranger, déplorant leur implication passée en Iraq et en Afghanistan.

Le président américain a pris le pari risqué, et d'une ampleur sans équivalent en matière de politique étrangère durant son mandat, d'être en mesure de détruire le site nucléaire iranien souterrain de Fordo tout en évitant d'importantes représailles de Téhéran contre les Etats-Unis.

Certains ont craint que l'Iran décide de fermer le détroit d'Ormuz, voie de transit majeure du commerce pétrolier mondial, d'attaquer de multiples bases américaines au Proche-Orient et de solliciter des groupes alliés pour qu'ils frappent les intérêts américains et israéliens à travers le monde.

Par ailleurs, selon des experts, plane également le risque que Téhéran tente de rapidement relancer son programme nucléaire et s'active pour développer une bombe, un scénario qui pourrait entraîner de nouveaux bombardements par Israël et les Etats-Unis.

QUESTIONS PERSISTANTES

Si Donald Trump parvient effectivement à apaiser la crise entre Israël et l'Iran, il pourrait également être en mesure de stopper les flux de critiques émises par les démocrates du Congrès et d'apaiser l'aile des républicains réfractaires aux interventions militaires à l'étranger, des mesures allant à l'encontre des promesses de campagne du président républicain.

Le chef de la Maison blanche serait alors en mesure de se recentrer sur ses autres priorités politiques, comme la déportation des sans-papiers et les droits de douane.

Reste que Donald Trump et ses alliés ne pourront pas totalement ignorer le dossier iranien et les questions persistantes qu'il pose.

"Le cessez-le-feu peut-il tenir ? Oui, les Iraniens en ont besoin et les Israéliens ont désormais agi contre la liste de cibles" de l'armée israélienne, a déclaré Dennis Ross, ancien négociateur au Proche-Orient pour des administrations républicaines et démocrates.

Il a ajouté cependant que des obstacles demeuraient. "L'Iran est grandement affaibli mais quel est l'avenir de ses programmes balistique et nucléaire ? Qu'advient-il de son stock d'uranium hautement enrichi ? Des négociations seront nécessaires - et elles ne seront pas faciles à résoudre".

(Matt Spetalnick, Steve Holland et Jeff Mason, avec la contribution de Phil Stewart; Jean Terzian pour la version française, édité par Zhifan Liu)

1 commentaire

  • 24 juin 20:00

    Israel a évité au monde des centaines de bombes A aux mains des mollahs fous, avec l’aide bien-pensante des US.

    Les mollahs n'ont plus qu'à mettre en scène leurs mascarades pour sauver la face.

    Dommage que personne n’ait pensé à faire cela en 38 (ou même en 33).


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